Récit d’émancipation dans sa forme comme dans son propos, Tumeur ou tutu fait l’effet d’une euphorique déflagration poétique tout en nous interrogeant sur les violences cachées au sein du foyer, ouvrant la porte du brûlant dossier de la famille, surtout quand celle-ci paraît tout à fait normale.
          Elle dit Je, on ne connait pas son prénom, et de ses 3 ans à ses 27 ans elle cherche à comprendre ce qui se passe en elle, telle une détective à l’humour déroutant et réjouissant.
          Entre les cris de sa mère et les silences dérangeants du père, elle scrute le langage des adultes et invente ses propres mots, surnoms, mélange le lexique pour mieux dire ce qu’elle ressent sans bien comprendre. La maltraitance psychologique et parfois physique de la mère n’est pas visible de l’extérieur et, même quand l’enfant tente d’envoyer quelques signaux à l’école ou aux amis des parents, personne ne s’en préoccupe car, après tout, « ça ne les regarde pas ».
          Sa quête de justice et de justesse dans les mots et la communication ne suffisant pas à calmer la « monstre » qui lui tiraille corps et tête, elle se tourne en grandissant vers les mathématiques, trouve refuge dans une logique en apparence implacable. Sauf que la vie ne peut se réduire à une équation.
          Même quand l’amour fait taire « la monstre », la reproduction des violences se fait jour et il n’y aura d’autres issues que de regarder la béance bien en face, seule résolution de l’équation.